Gouvernement Chômeurs livrés en pâture au patronat ![]() À cet effet, le volet emploi du plan Borloo prévoit d’accroître le contrôle pesant sur les demandeurs d’emploi, dans le cadre d’un " service public de l’emploi " largement ouvert au privé, soumis à l’UNEDIC, et chargé de pousser au " retour à l’emploi " le plus rapide possible, aux conditions dictées par les employeurs. Actuellement, le Code du travail stipule qu’un chômeur a droit à une allocation à partir du moment où il " accomplit des actes positifs de recherche d’emploi ". Borloo veut durcir cette obligation : le chômeur devra accomplir des " actes positifs et répétés en vue de retrouver un emploi ", et " participer à toute action d’aide à la recherche d’emploi, d’insertion et de formation qui lui est proposée par le service public de l’emploi ". Autrement dit, le demandeur d’emploi sera totalement soumis aux services de placement. Il ne pourra plus refuser une formation qui n’a rien à voir avec son profil, mais qui correspond aux secteurs qui recrutent (hôtellerie, restauration, bâtiment). Dans la catégorie " insertion ", il ne pourra pas non plus refuser un stage gratuit ni un contrat d’insertion RMA (revenu minimum d’activité). Contrôle et sanctions Cette obligation se double évidemment d’une sanction. Actuellement, un chômeur peut perdre son allocation s’il refuse " un emploi compatible avec sa spécialité ou sa formation antérieure, ses possibilités de mobilité géographique compte tenu de sa situation personnelle et familiale, et rétribué à un taux de salaire normalement pratiqué dans la profession et dans la région ". Dans le projet Borloo, on tient compte de la formation antérieure du chômeur " ou de celle que le service de l’emploi lui propose ou lui a permis d’acquérir ". La boucle est bouclée : un chômeur sera sanctionné s’il refuse un emploi dans un secteur dans lequel on l’a obligé à se former. De même, le critère géographique est apprécié aussi en fonction " des aides à la mobilité qui sont proposées " au chômeur. Sous prétexte du versement d’une petite prime, il faudra aller travailler à l’autre bout du département... Comme le suggérait le rapport Marimbert s’inspirant de la récente réforme allemande, la pression de la sanction est renforcée par un système de gradation. L’allocation pourra être d’abord réduite, avant la punition finale de la suppression. Mais qui sera chargé de ce contrôle ? La décision finale de la sanction reste sous l’autorité du préfet du département, dans le cadre d’une procédure dite " contradictoire ". Mais les " opérations de contrôle de la recherche d’emploi " exercées par des agents du ministère du Travail sont élargies aux agents ANPE et surtout aux agents des ASSEDIC. L’organisme d’assurance chômage, géré paritairement mais dominé par le patronat, mettra certainement beaucoup d’énergie dans ce nouveau pouvoir de contrôle, qui pourra aboutir à des économies par la suppression d’allocations. Nouveau contrat précaire Le " contrat d’activité ", récemment rebaptisé " contrat de mobilisation vers l’emploi " par le ministre, est l’équivalent pour les communes et les associations du RMA créé l’an dernier pour le secteur marchand. Ce sera un CDD de six mois renouvelable dans la limite de trois ans, payé au SMIC horaire pour 26 heures par semaine en moyenne (750 euros brut environ). Pour plus de flexibilité, l’employeur pourra moduler l’horaire dans la limite de 35 heures par semaine. Une formation est prévue, mais pas sa rémunération ! Comme pour le RMA, l’employeur touchera une aide de l’État équivalent à l’allocation du RMI. Au passage, le ministre veut modifier les critères d’accès : le contrat de mobilisation vers l’emploi, tout comme le RMA seraient ouverts non seulement aux allocataires du RMI (1 million), mais aussi aux personnes touchant l’ASS (400 000), après seulement six mois d’allocation. La fiction d’un contrat destiné aux chômeurs en grande difficulté, qui justifierait d’après le gouvernement le caractère dérogatoire de ces contrats, éclate. Les employeurs ne se priveront pas de sélectionner les candidats et de faire travailler à bas coût des chômeurs parfaitement au point. Fanny Doumayrou, l’Humanité du 15/09/2004 (extraits)
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